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Commentaire de Charles-Henri

sur Frédéric Lordon commente et échange avec Bernard Friot


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Charles-Henri 7 octobre 2014 17:16

Aussi brillant soient-ils (je parle notamment pour Lordon, je ne suis pas convaincu par Friot) ces intellectuels n’en sont pas moins « victimes » de l’esprit de boutique (ou persévérance dans l’être).
Il défendent LEURS trouvailles, comme vous le faites pour la vôtre. La différence est probablement que comme vous étiez plus frais, plus naïf (dans le bon sens du terme) en commençant votre cheminement d’éveil politique, vous avez été moins entravé par des préjugés et êtes parvenu à un ensemble de constats bien plus radicaux que les leurs.
De ce point d’observation en recul, il vous est plus facile d’identifier les analyses et dispositifs qui seraient utiles à une refondation radicale de notre système politique, analyses et dispositifs d’autant plus faciles à intégrer à votre pensée que leurs propositions sont secondaires dans l’ordre des changements à mettre en œuvre. Ce sont d’ailleurs souvent des solutions plus techniques que politiques.
Or, les personnes capables d’accepter le caractère secondaire de leur paradigme, de leurs solutions, lorsqu’elles sont confrontés à un modèle plus radical et plus puissant sont rares. Elles sont d’autant plus rares que haut placées dans l’ordre symbolique des intellectuels et de la notoriété.
Ce n’est pas une question d’intelligence, mais de fonctionnement de l’égo. Lordon est peut-être encore trop passionné par ce qu’il fait, trop gratifié par le retour médiatique et populaire qu’il reçoit pour l’accepter. Comment pourrait-il faire siennes vos réflexions sans apparaître comme un suiveur, lui si souvent radical par ailleurs ?
Peut-être aussi n’ont-ils pas votre courage. Vous avez osé braver les interdits pour dialoguer avec tout ceux qui vous paraissaient sincères et susceptibles d’apporter une pierre à l’édifice. Nul doute que vous savez ce qu’il en coûte ! Force est de constater que ni Friot, ni Lordon (ni d’autres que vous appréciez mais qui ne vous évoquent guère en public) n’ont eu à subir de telles attaques, probablement du fait de la prudente distance qu’ils ont su maintenir entre les stigmatisés et eux. Or, du fait même de votre curiosité et de votre refus d’un ostracisme stupide (souvent inconsciemment au service de l’ordre établi) vous faites malheureusement partie des stigmatisés…
Par ailleurs, une particularité de Lordon m’interroge, soit le hiatus entre la qualité et la radicalité de son questionnement philosophique (cf. intervention magistrale « analytique du dégrisement ») et l’extrême modération de la plupart de ses propositions de modification du système.
Être fin connaisseur de Spinoza ne le met pas à l’abri des puissances passionnelles qui l’animent, comme être psychiatre ne met pas à l’abri de la maladie mentale.
Mon intuition est que la cause des causes de notre impuissance politique est probablement anthropologique (les sociétés qui ont survécus auraient « sélectionné » une propension minimum à l’obéissance, une crédulité moyenne nécessaire et suffisante à leur perpétuation).
Certains virus abattent la bête, certaines bêtes meurent de mort naturelle en étant parvenu à se défendre de toutes les attaques virales. Force est de reconnaître que le système de domination capitaliste est très apte à produire les anti-corps ad-hoc.
Je ne suis pas très optimiste quant à la possibilité de refonder nos systèmes politiques pour le meilleur mais comme je sais que je peux me tromper, je fais ce que je peux et persévère à tenter de transmettre le goût du questionnement radical de l’ordre politique.


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