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Commentaire de Joe Chip

sur L'espoir Poutine


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Joe Chip Joe Chip 9 juillet 2017 11:26

(suite)

Ex : je connais une personne qui fait une fixette sur les smartphones et les écrans plats dont les assistés et les chômeurs s’équiperaient selon lui à tire-larigot grâce au RSA. Vous pouvez lui expliquer de toutes les manières que ce raisonnement est absurde, il n’en démordra pas. Ce qui le dérange profondément, c’est que des gens qu’il perçoit comme inférieur à lui aient accès en France à un certain "confort" d’existence qui devraient à ses yeux leur être refusé. 

Là encore on voit que l’on reste un vieux pays catholique. L’idée que l’existence est essentiellement une purge et qu’il faut soit en baver au boulot ou endurer sa pauvreté reste profondément ancrée dans la mentalité collective. A droite, cela donne l’idéologie des "coups de pieds au cul", à gauche l’hypocrisie mondaine et le misérabilisme social. 

Une économiste américaine (dont le nom ne me revient pas, malheureusement) a longuement étudié les comportements de consommation des populations pauvres, à la fois dans le monde occidental et dans les pays les plus déshérités, et a toujours fait le même constat : aussi indigents soient-ils, les gens vont avoir tendance à privilégier les dépenses dites de confort aux dépenses dites alimentaires ou essentielles. Par exemple, elle a rencontré des gens gagnant moins de deux dollar par jour (le seuil de pauvreté absolue) qui préféraient économiser et se priver de nourriture pour pouvoir acheter un vieux téléviseur. Les pauvres se comportent donc exactement comme les riches : ils veulent accéder au loisir et à leur propre version du "luxe". Comme l’avait subodoré Voltaire au XVIIIème siècle, le superflu est une chose très essentielle. La satisfaction des besoins non utilitaires et "superficiels" est inscrite dans la nature humaine. Sans cela, pas d’art, pas de musique, pas de création, pas de spiritualité. A contrario les sociétés qui ont historiquement consacré l’utilitarisme - c’est à dire les sociétés communistes - sont devenus des prisons à ciel ouvert. 

Malheureusement, ce genre d’analyse à la fois pragmatique et intelligente est impossible en France où la pauvreté est analysée non pas comme un état mais comme un concept, d’ailleurs tant à gauche qu’à droite. A l’image caricaturale du profiteur qui vole le pain de la bouche des classes moyennes (Wauquiez et le retour des "classes dangereuses") répond la stéréotypie et le lyrisme abstrait d’un Mélenchon idéalisant les pauvres et les démunis. Et au fond ces deux images renvoient à la vieille dialectique bourgeoise et chrétienne du XIXème siècle : le pauvre décrit alternativement comme un parasite asocial et antinational (vision de Javert) ou comme le porteur christique et prométhéen des souffrances et des espérances de l’humanité (Jean Valjean). 

Maintenant essayez d’expliquer ça à des vieux réacs remplis de bile qui pensent que tous ceux en-dessous d’eux devraient en chier plus qu’eux dans la vie ou à des gauchistes qui confondent l’argent et le caca, bon courage...


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