Entre Nuit debout et la CGT, François Ruffin
rêve de lien.
François
Ruffin et sa bande en sont persuadés, Nuit debout a besoin d’un
second souffle. Et le réalisateur de Merci patron ! voit
les choses en grand : un meeting commun entre le mouvement de la
place de la République et les syndicats à l’issue de la
traditionnelle manifestation du 1er Mai. Mais ça
coince, d’un côté comme de l’autre. Pourtant, le plan était
presque parfait. Tout comme le calendrier. L’idée ? Faire le pont
entre la place de la République et Marseille, où
se déroulait cette semaine le congrès de la CGT. La
stratégie ? Débarquer en plein débat cégétiste avec un mandat de
Nuit debout pour faire déboucher le cortège syndical place de la
République. Sauf que rien ne s’est passé comme prévu.
L’équipe du journal Fakir, dont Ruffin est le
rédacteur en chef, a donc organisé mercredi, à la Bourse du
travail de Paris, une soirée intitulée « L’étape d’après ? ».
Le but : réfléchir à l’avenir du mouvement Nuit debout pour les
semaines à venir. Le lieu est symbolique. C’est dans cette même
salle que, le 23 février, est sortie du chapeau l’idée
de ne pas rentrer chez soi après la manifestation du 31 mars.
Depuis cette date, la place de la République vit au rythme du
mouvement chaque soir : des prises de parole d’environ deux minutes
s’y enchaînent. Chacun vient énoncer ses galères, passer des
appels à la mobilisation. A côté, les commissions thématiques et
logistiques organisent la vie de la place et offrent des espaces de
discussions collectives. Mais pour certains, cela manque de concret.
« Les assemblées générales sont interminables et ne permettent
pas de faire émerger des propositions concrètes », résume
Ruffin. D’où sa démarche. Et la question qu’il pose : comment
le mouvement peut-il se positionner à l’approche des deux journées
d’action, le 28 avril contre la loi travail et celle du
1er Mai ?
Mercredi soir, dans une salle archicomble, le journaliste détaille
sa stratégie : « Je souhaite qu’on fasse un très gros 1er Mai,
que la manifestation se termine à République et qu’on fasse un
meeting avec les syndicats qui sont opposés à la loi travail. »
Pendant près de deux heures, tous les intervenants invités par
Fakir vont dans le même sens : le rapprochement avec les
syndicats doit être la prochaine étape du mouvement Nuit debout.
Pour finir, la parole est donnée à la salle. C’est là que les
choses se compliquent. Même si une grande majorité des personnes
présentes est favorable à la proposition de François Ruffin, la
méthode fâche ceux qui ont l’impression d’être face à une
avant-garde éclairée, retranchée à l’écart de la place.
D’autant qu’ils n’ont qu’une seule minute chacun pour
s’exprimer. « On n’a pas attendu les intellectuels pour avoir
l’idée de se mobiliser massivement pour le 1er Mai »,
lance quelqu’un. Lorsque la salle se vide dans le brouhaha, Ruffin
se prend la tête entre les mains. La soirée a fini en queue de
poisson. « Je n’ai pas réussi à obtenir un mandat de la salle
pour porter cette proposition à l’assemblée générale de Nuit
debout », constate-t-il, quelques jours après.
http://www.liberation.fr/france/2016/04/22/entre-nuit-debout-et-la-cgt-francois-ruffin-reve-de-lien_1448125