• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV Mobile


Commentaire de Anthony Michel

sur Le hors-la-loi d'hier contre le délinquant d'aujourd'hui


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Anthony Michel Anthony Michel 26 juin 2015 18:52

@Auxi

Bon rappel d’Eric Guéguen (merci) concernant l’expression oxymorique « anarchisme conservateur » que je reprends à mon compte moins pour créer une nouvelle bannière politique aux prétentions caricaturales — en m’écoutant parler et en me regardant le nombril — que pour faire réfléchir en termes de posture trans-courant compte tenu de l’imposture antidémocratique et bourgeoise du clivage politique gauche-droite. George Orwell nous dit, dans Le Quai de Wigan en 1938 : « En ce moment, la seule attitude possible pour toute personne décente, que son tempérament le porte plutôt vers les conservateurs ou vers les anarchistes, est d’œuvrer pour l’avènement du socialisme. Autrement, rien ne peut nous sauver de la misère actuelle et du cauchemar à venir. » 

On ne peut pas résumer la tendance conservatrice au sens de « conserver l’ordre établi ». Pourquoi, d’ailleurs, être conservateur serait forcément conserver l’ordre établi  ? Pourquoi ne s’agirait-il pas de conserver autre chose, de moins politique et « officiel », de plus moral et populaire ? L’écologiste radical, par exemple (et j’apprécie la figure de feu Edward Abbey), peut avoir un certain nombre de points communs avec l’anarchiste conservateur.
Le général De Gaulle avait des aspects conservateurs. Cela a-t-il fait qu’il a reconnu légitime le gouvernement du maréchal Pétain, puisque après tout ce dernier était l’ordre établi ? Si l’on associe généralement, mais non exclusivement, les hommes d’église au conservatisme, cela n’a pourtant pas empêché certains d’entre eux d’être parmi les premiers résistants durant la Seconde guerre mondiale... 

Alors certes, nous sommes aujourd’hui, à l’heure du novlangue, dans la culture des mots dénaturés, aux sens inversés. « Le véritable but du novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? […] Tous les concepts nécessaires seront exprimés chacun exactement par un seul mot dont le sens sera rigoureusement délimité. Toutes les significations subsidiaires seront supprimées et oubliées. […] Chaque année, de moins en moins de mots, et le champ de la conscience de plus en plus restreint. » (George Orwell, 1984) Il n’empêche que cela ne regarde que vous, Auxi, de vouloir prendre — par crainte d’être vu comme un réactionnaire par l’intelligentsia orientant le novlangue selon des intérêts bien précis ? — autant de précautions avec le mot « tradition », au sens lui-même détourné... en précisant toutefois que de claires distinctions sont nécessaires entre « réaction » et « conservation » par exemple... 

Enfin — sans aller jusqu’à dire comme l’anthropologue Marcel Mauss qui jadis affirmait non péjorativement qu’être socialiste « c’est être archaïque » — il s’agit de défendre un socialisme qui retourne à sa moralité originelle (Saint Simon, Fourier puis Proudhon et Bakounine) et prend appui notamment sur les traditions des gens ordinaires qui entretiennent jusqu’ici l’entente et l’entraide quotidiennes, limitant l’envahissante logique du « tout doit se marchander ». Posture peut-être un peu naïve... Mais alors on voit que l’anarchisme conservateur ce n’est même pas le sympathiquement cynique mais trop élitiste et, en vérité, peu politique anarchisme de droite... 


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès